Serres, Michel, Musique et bruit de fond, dans Hermès II : L'interférence, pp.193-4 (Minuit), 邦訳:ミシェル・セール「音楽と暗騒音」(「干渉 <ヘルメスII>」所収, pp.188-9)
Cette musique est bien universelle : chacun peut l'entendre, quelle que soit sa langue, sa souffrance et sa condition, son monde et sa naissance, puisqu'elle est conditionelle,préalable à toute émission, à toute réception. Cet universel est intersubjectif ; il est aussi objectif puisqu'elle traduit le bruit de monde même, le sous-murmure des objets (tout comme si ce murmure inter-objectif était préalable et condition des messages intersubjectifs), le fond de l'univers, son rayonnement noir. Musique moléculaire et monadique, musique de grenaille, musique noire, effet de chute d'eau des moulins, de la mer, de nos moyens d'écoute, physiques et astrophysiques, elle retrouve d'un coup, avec un empan supérieur, la dimension cosmique, du très petit à l'immense, qu'avait intuitionnée le génie grec. Universelle et nécessaire en son rapport formel, exacte et fidèle à la constitution profonde de l'objet, fluctuante avec les échanges mondiaux, conditionelle et sans finalité, murmure au fond de tout discours, elle est universelle pour nous.
Lévinas, Emmanuel, Autrement qu'être ou au-delà de l'essence, L'exposition, Chaptre II : De l'intentionailité au sentir, 3. Temps et Discours, d) L'amphilobologie de l'être et de l'étant, p.71 (le livre de poche), 邦訳「存在するとは別の仕方で あるいは存在することの彼方へ」p.87, 「存在の彼方へ」p.107
... La musique dans Nomos alpha pour violoncelle seul de Xenakis, par exemple, infléchit la qualité des notes émises en adverbes, toute quiddité se faisant modalité, les cordes et le bois s'en allant en sonorité. Que se passe-t-il ? Une âme se plaint-elle ou exulte-t-elle du fond des sons qui se brisent ou d'entre les notes qui ne se fondent plus en ligne mélodique, elles qui jusqu'alors se succédaient dans leurs identité contribuant à l'harmonie de l'ensemble, faisant taire leur crissment ? Anthoropomorphisme ou animisme trompeurs ! Le violoncelle est violoncelle dans la sonorité qui vibre dans ses cordes et son bois, même si déjà elle retombe en notes ― en identités qui se rangent en gammes à leur place naturelle, de l'aigu au grave, selon des hauteurs différentes. L'essence du violoncelle ― modalité de l'essence ― se temporalize ainsi dans l'oeuvre.
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